Un sous-marin américain retrouvé 75 ans après sa disparition au large d Okinawa
La marine US savait que le « Grayback » avait coulé quelque part au large d’Okinawa. Les recherches d’un ingénieur japonais ont aidé une équipe d’archéologues américains à le retrouver.
L’annonce a été faite le 11 novembre, lors du Veterans Day, la journée commémorative observée aux Etats-Unis en l’honneur des anciens combattants,
mais c’est le 5 juin qu’une équipe d’archéologues sous-marins, menée par Tim Taylor, qui dirige le projet Lost 52, l’a localisé.
Cette découverte a été confirmée par le responsable du service d’archéologie sous-marine de la marine américaine.
Le Grayback était l’un des 263 sous-marins américains qui ont combattu lors de la seconde guerre mondiale et l’un des plus performants sur le plan purement guerrier.
Il se classait en 20e place concernant le tonnage de bateaux coulés (63 835 t au total) et au 24e rang pour le nombre (14 navires coulés).
S’ils ne représentaient que 2 % de la flotte américaine, les sous-marins américains ont coulé pendant la guerre 30 % de la marine impériale et
60 % de la marine marchande japonaise, asphyxiant l’économie du Japon. Cinquante-deux sous-marins ont coulé, tous dans le Pacifique à l’exception de deux navires.
USS Grayback

Parti de sa base de Pearl Harbor, le 28 janvier, le Grayback annonçait le 24 février 1944 avoir coulé deux navires japonais et recevait l’ordre de faire route vers Midway,où il était attendu le 7 mars, pour reconstituer son stock de torpilles. Contacté le 10 mars, le Grayback ne répond pas et, le 30 mars 1944, la Navy le porte disparu,
présumé perdu en mer.
Après la guerre, la marine américaine a entrepris de chercher les 52 sous-marins manquants.
Le « U.S. Submarine Losses, World War II », un recueil publié en 1949 et remis régulièrement à jour, fournit l’emplacement approximatif où chaque navire avait disparu.
La marine pensait que le Grayback avait coulé quelque part au large d’Okinawa. En s’appuyant sur les comptes rendus de l’armée japonaise, elle savait qu’il avait été coulé
après avoir été touché par un avion japonais. Le compte rendu de la mission de l’appareil donnait les latitude et longitude auxquelles le sous-marin avait été attaqué :
25° 47’N, 128° 45’ E.
Mais ce compte rendu était erroné. C’est ce qu’a découvert l’équipe de Jim Taylor et notamment un de ses membres, Yutaka Iwasaki.
Cet ingénieur japonais qui habite Kobé participe en tant que chercheur et traducteur, explique au Monde l’équipe du Lost 52 Project.
Passionné par le sort de la marine marchande japonaise, il s’est naturellement intéressé à la flotte des sous-marins américains.
« Trouver des sous-marins américains fait partie de mes recherches pour présenter la tragédie de la guerre, a-t-il expliqué au New York Times.
C’est mon hobby et aussi ma passion. »
A la demande de Jim Taylor, M. Iwasaki a exploré les archives de la base de la marine impériale de Sasebo, dans le sud du Japon, dont les dossiers contiennent les rapports quotidiens reçus par radio de la base aérienne navale de Naha, à Okinawa.
Le compte rendu du 27 février 1944 signalait qu’un avion torpilleur Nakajima B5N avait largué une bombe de 226 kg sur un sous-marin en surface, l’atteignant juste à l’arrière.
Selon le rapport, le sous-marin avait explosé et coulé, ne laissant aucun survivant.
Dans cet enregistrement radio, il y a une longitude et une latitude de l’attaque, très clairement. Mais les coordonnées ne correspondent pas à 160 km à celles publiées en 1949
par la marine américaine.
Muni des ces nouvelles informations, Tim Taylor et son équipe se sont rendus en juin au large du Japon.
Leurs appareils de recherche – qu’il compare à des drones sous-marins – utilisent un sonar pour créer des images détaillées du fond de l’océan,
qui permettent de rechercher une épave.
L’avant-dernier jour de l’expédition, un de leurs « drones » a rencontré des problèmes techniques.
L’équipage l’a remonté à la surface et a commencé à examiner les images capturées. Il a rapidement repéré deux anomalies sur le fond de l’océan et a préparé un autre appareil
de recherche, piloté manuellement et disposant de caméras haute définition. Quelques heures plus tard, Tim Taylor et son équipage apercevaient la coque du sous-marin,
reposant à 435m sous la surface de la mer, et parvenaient à lire la plaque « U.S.S. Grayback ».

« C’était incroyable. Tout le monde était excité. Puis vous réalisez que quatre-vingts hommes reposent là-dedans et ça donne à réfléchir »,
raconte Tim Taylor au Washington Post.

Le Grayback n’est pas le premier sous-marin découvert par cet explorateur, qui s’est mis en tête de retrouver les épaves de tous les sous-marins américains perdus
pendant la guerre.
En 2010, il a trouvé son premier sous-marin, le USS R-12, qui avait sombré au large de Key West, en Floride, lors d’un entraînement en 1943.
Pour mener à bien ses recherches, il a créé une entreprise privée, le projet Lost 52, et s’appuie sur des technologies qui n’existaient pas il y a une dizaine d’années.
Tim Taylor estime que sur les 52 sous-marins américains perdus, 47 sont considérés comme pouvant être découverts ; les cinq autres ont disparu dans des zones inconnues.
En plus du Grayback et du R-12, il a découvert le Grunion, au large de l’Alaska, le S-28, au large d’Honolulu, et le S-26, au large du canal de Panama.

source
yahoo.fr