C’est l’histoire d’un audacieux raid allemand au mois de septembre 1914.
Partis du sud-est d’Amiens, l’objectif principal des commandos allemands est de se diriger vers l’ouest, jusqu’en Normandie, pour y faire sauter des ponts ferroviaires
afin de retarder l’arrivée de renforts. Mais une femme de 56 ans va tout faire échouer…
Début septembre 1914, les troupes allemandes sont presque aux portes de Paris. Mais le 5, les Franco-Britanniques lancent une série d’offensives qui vont prendre le nom
de la première bataille de la Marne. Côté Français, l’utilisation des fameux taxis pour mobiliser les troupes est entrée dans la légende, mais les résultats sont éloquents :
après plusieurs jours de furieux combats, les Allemands sont repoussés et leur progression vers Paris est définitivement arrêtée.
Devant l’impossibilité de procéder à une percée profonde, les deux camps commencent à marquer le pas... et la course à la mer s’organise.
Chaque belligérant tente d’opérer des manoeuvres de contournement de son adversaire afin de le neutraliser, mais les échecs répétés poussent chacun vers le nord-ouest.
C’est dans cette situation que le commandement allemand décide de mener des actions de sabotage sur les arrières alliés afin d’empêcher l’arrivée de renforts…
Ces opérations de sabotage débutent le 8 septembre, où quelques Pionieren (sapeurs) parviennent à s’infiltrer entre les lignes alliées et endommagent la voie ferrée Paris-Beauvais ;
en même temps, un second groupe effectue des sabotages sur la ligne Paris-Gisors.
La particularité de ces opérations ? Elles sont effectuées grâce à des automobiles puissantes, permettant d’atteindre les lieux et de les quitter très rapidement.
Trois jours plus tard, c’est au tour d’un pont au nord d’Amiens de faire les frais des sabotages... l’équipe allemande étant même confondue avec des Britanniques par les civils !
Encouragé par les précédents succès, le commandement allemand monte, le 13 septembre 1914, un nouveau raid avec trois véhicules montés par un groupe
du Pionier-Regiment Nr. 18 Sarrois commandés par le capitaine Walther Tilling et chargé de 500 kg d'explosifs.
Partant, le 13 septembre, de Leuilly-sous-Coucy à bord de trois voitures et d'un camion, le groupe se dirige vers les lignes françaises en roulant de nuit.
La colonne essuie des coups de feu près de Mareuil-la-Motte puis près de Lassigny. Déviant sa route vers le Nord à Margny-sur-Matz, elle passe à Candor,
Avricourt, Margny-aux-Cerises où elle se trouve au milieu des troupes de cavalerie françaises.
Après avoir perdu une automobile Adler, le commando se faisant passer pour des Anglais, arrive à Montdidier où il écrase une sentinelle française qui leur avait intimé l'ordre
de s'arrêter. Après s'être caché la journée dans le bois de Mont au Sud-Ouest de Saint-Just-en-Chaussée, le commando repart en soirée du 15 septembre
et traversant Bresles, Fouquerolles, Tillé, Troissereux, Savignies.
Adler 1909
Un autre véhicule tombe en panne au hameau du Vivier-Danger à Ons-en-Bray. Le véhicule est abandonné sur place avec une dizaine d'hommes,
qui doivent se débrouiller pour regagner leurs lignes par leurs propres moyens, tandis que le convoi continue sa route par Saint-Germer-de-Fly et Neuf-Marché
où il est contraint de s'arrêter dans la forêt aux Flamants en raison d'une panne de l'un des deux véhicules restants.
Le véhicule abandonné était une Adler de 35 chevaux, qui fut remorquée jusqu'à Gournay-en-Bray le 16 septembre.
Les dix Allemands sont capturés au hameau du Mont-Bénard sur la commune de Savignies. Interrogés, ils se disent perdus et abandonnés par leurs chefs.
Le 16 septembre 1914, vers 8h30 du matin, Octavie Delacour, âgée de 56 ans, quitte sa demeure du hameau du Bord du Bois sur la commune de Martagny
et s'engage sur le chemin d'exploitation forestier afin de rejoindre Ferrières-en-Bray.
Après avoir parcouru environ 1 kilomètre, un soldat vêtu d'un uniforme gris cendré sort brusquement, tenant une baïonnette à la main, et lui fait signe de s'arrêter.
Après discussion entre la sentinelle et le capitaine Tilling, ce dernier permet à Octavie de repartir, mais celle-ci a reconnu les casques et la langue.
Sortant de la forêt à hauteur de la ferme de la Fieffé, elle aperçoit deux autres sentinelles cachées dans les taillis et se dirige sur Neuf-Marché.
Arrivée à Neuf-Marché, elle avertit le maire que les Prussiens sont dans le bois. Le maire envoie le garde champêtre aux renseignements. Celui-ci revint sans avoir rien vu...
il n'avait pas été au bon endroit.
Continuant son chemin, Octavie Delacour s'arrête à la 3e légion de gendarmerie de Gournay-en-Bray, à midi, où elle s'attache à démontrer que c'étaient des Prussiens,
et non des Anglais qui étaient dans la forêt et qui faisaient le guet, que c'étaient ces mêmes soldats qui avaient occupé la région durant la guerre de 1870
alors qu'elle avait une douzaine d'années. Elle ne réussit pas à convaincre totalement le commandant de la brigade, le maréchal des logis Jules Crosnier,
mais celui-ci, soucieux du devoir, décida d'aller voir sur place en donnant rendez-vous à la brigade de Mainneville, située dans le département de l'Eure,
afin de pouvoir cerner le lieu où l'on avait aperçu ces militaires.
Octavie Delacour decoree