Ils sont fous!!
Aroha ia rahi : c’est le nom du parti que Mouillot Taeaetua veut lancer dans la course aux territoriales.
L’ancien policier, un temps chef de la sécurité à Moorea, veut le faire avec « tous ceux qui sont intéressés », par sa candidature et son projet.
Au menu : location de Moruroa, Fangataufa et Hao à l’armée américaine, création d’une « zone franche » sur l’ensemble du fenua ou encore effacement de la dette
« sans contrepartie » par les grandes puissances occidentales.
Les statuts du parti sont déposés, le logo – or et blanc, orné d’une pirogue, d’oiseaux et de cocotiers – est dessiné, ne reste plus qu’à « faire venir du monde » pour Aroha ia rahi.
Et Mouillot Taeaetua l’assure : « ça va aller vite, très vite ». D’abord parce que l’ancien gardien de la paix, passé plus tard par la sécurité de l’assemblée,
celle de Moorea et par la sécurité privée, dit avoir déjà « beaucoup de contacts » pour former sa liste.
Ensuite parce que le résident de l’île sœur sent autour de lui le « malaise intrinsèque, fulgurant » des Polynésiens.
Il y a ceux qui « n’arrivent plus à joindre les deux bouts », ceux qui veulent entreprendre « mais sont empêchés par les taxes », ou
encore les familles démunies par la perte de « repères » de leurs jeunes.
« Il faut remettre des fondations louables, familiales, un respect réciproque », insiste celui qui fêtera ses 60 ans la semaine du 1er tour.
Et pour rétablir ces « valeurs », aucun doute : il faut du sang neuf aux manettes du Pays.
Mouillot – que « tout le monde appelle par son prénom » – préside le parti, tire la liste et « sera président du Pays », il l’assure. Les 72 autres candidats Aroha ia rahi
doivent adhérer au projet, n’avoir « jamais été élus » ni avoir « fait la girouette en politique ». Et surtout ils doivent être prêts à être « exemplaires ».
« Sur le parking de la présidence, de l’assemblée, et même pour tous les directeurs de service et compagnie, plus de bagnoles de fonction, c’est fini, lance le souriant candidat,
qui s’était aussi proposé, voilà une dizaine d’année, pour prendre la tête d’Air Tahiti.
Vous prenez votre voiture, allez au travail comme tout le monde, remplissez vous-même votre essence, payez le mécano avec vos propres deniers.
Et le président sera le premier à faire l’effort ».
Pas question, dit-il, de cracher sur les anciens dirigeants, sur ses futurs concurrents aux territoriales, ou même sur le gouvernement sortant.
L’ancien athlète, qui a abandonné les compétitions de course à pied mais pratique toujours le surf à l’occasion, veut la « jouer fair-play ».
À peine lâchera-t-il que le projet des indépendantistes, et surtout leur « obsession » de l’ONU n’a « aucun sens », et que sans renouvellement de la classe politique,
« ce sera le chaos ». « Je l’ai connu, Papeete en feu, je ne veux plus voir ça ». « Moi je suis pro-Français, pro-Européen, et pro-Américain », précise-t-il.
Car tous ces pays occidentaux, à l’entendre, ont « directement ou indirectement » profité des essais nucléaires en Polynésie pour « se placer sur l’échiquier mondial ».
Et continueraient d’en profiter au travers du nucléaire civil – qui pourtant n’a que très peu de lien avec les essais. « On a été sacrifié sur l’autel du nucléaire, lance-t-il.
Et maintenant ils ont tout, et on a des clopinettes. » Tous, donc, doivent aider la Polynésie à « remonter la pente », à « prendre un nouveau souffle ». « Et ils le savent très bien ».
Ainsi, le « président Mouillot » ira, dès les premiers jours de son mandat, à la rencontre d’Emmanuel Macron, un élu « jeune, moderne, bien entouré », « un copain »,
contrairement à Nicolas Sarkozy, accusé d’avoir coulé la Polynésie en même temps que le Pacte de progrès et, plus tard, l’ITR.
Le dirigeant fraichement élu « rassemblera » aussi « les autres chefs d’État européens ». Il ne leur fera pas face seul, bien sûr. Plutôt que ses ministres – « six, pas un de plus,
pas de moins » et tous vice-présidents – il emmènera avec lui, une équipe de « champions » polynésiens, de spécialistes de « tous les droits », qui, ensemble,
« sauront convaincre ». « Des diplômés, des gens compétents, on en a plein en Polynésie, ils ne sont pas en politique parce qu’ils sont souvent timides », explique-t-il.
Aroha ia rahi arrivera à les mobiliser. Mais pourquoi Macron et les autres accepteraient-ils ses propositions : « quand ils verront les résultats de l’élection, ils ne vont pas hésiter »,
dit-il, tendant sa main pour prendre le pari.
Au passage, l’État pourrait même revenir sur la disparition de l’ITR pour ses fonctionnaires, et garantir la retraite à 59 ans « pour tout le monde » au fenua.