Opération Gomorrhe,les civils doivent mourir aussi!

L’opération Gomorrhe – son nom sinistrement approprié, pour la ville biblique détruite par Dieu avec le feu et le soufre – représentait un changement de tactique
pour le Bomber Command et elle inaugurerait également de nouveaux développements techniques, y compris l’utilisation de contre-mesures d’usurpation de radar.
Pendant ce temps, la combinaison de bombes hautement explosives et incendiaires, placées avec précision sur une zone résidentielle donnée, introduirait le monde à la terreur
de la tempête de feu.

Le bombardement de Hambourg en juillet 1943 impliquait en fait six raids distincts, y compris la coopération directe du Bomber Command de la RAF
et de la Eighth Air Force de l’armée de l’air américaine, le raid de la nuit du 27 au 28 juillet a été le plus dévastateur.
Il a tué environ 20 000 personnes en une seule nuit.
En comparaison, la nuit la plus meurtrière de l’offensive éclair de la Luftwaffe allemande contre Londres en 1940-41 a tué environ 1 400 personnes.
Aucune autre attaque aérienne alliée sur le théâtre d’opérations européen pendant la Seconde Guerre mondiale ne s’en approcherait.


Une photo bien connue montrant un Avro Lancaster du Bomber Command de la RAF lors d’une attaque antérieure sur Hambourg, dans la nuit du 30 au 31 janvier 1943.
Le bombardier se profile contre les fusées éclairantes, la fumée et les explosions.
Ce raid était la première fois que le radar H2S était utilisé par l’avion Pathfinder pour diriger la force vers la cible.





Initialement, la RAF avait envoyé ses bombardiers contre des cibles principalement industrielles en Allemagne, dans l’espoir d’avoir un impact sur la production d’armes
et d’entraver d’autres fonctions critiques pour la guerre.
Mais à ce stade, la capacité des avions à placer leurs bombes sur de telles cibles avec la précision requise signifiait qu’une grande partie de cet effort
était un effort gaspillé, faisant payer un très lourd tribut aux équipages.

La façon de penser des planificateurs de guerre britanniques a commencé à changer.
Lorsque, par exemple, une usine de munitions individuelle aurait pu être ciblée, l’étape logique suivante consistait à attaquer également toute la zone entourant
une telle usine. Enfin, l’objectif a été étendu aux travailleurs sur lesquels cette usine comptait.
Cela signifiait lancer des raids contre les zones résidentielles tentaculaires des villes où vivaient ces civils.

Une décision conjointe du Cabinet de guerre britannique et de l’état-major de l’Air en 1942 appelait à cibler « le moral de la population civile ennemie
– en particulier les travailleurs de l’industrie ».
La RAF y parviendrait en lançant des raids massifs contre les villes allemandes de plus de 100 000 habitants.
Le but de la campagne de « bombardement de zone » était de tuer et de faire des travailleurs sans abri, perturbant la production industrielle tout en sapant le moral
des civils – bien que ce dernier soit quelque chose que la Luftwaffe avait singulièrement échoué à faire en ciblant les civils britanniques en 1940-41.

Pour causer le maximum de dégâts sur les cibles urbaines, il a été déterminé que la charge utile optimale comprenait un mélange de bombes hautement explosives
et d’incendiaires. Les plus grosses armes hautement explosives effondreraient les structures des bâtiments, bloqueraient les routes, détruiraient les conduites d’eau, etc.
Des incendiaires densément emballés déclencheraient alors des incendies parmi les décombres.

Dans un premier temps, au printemps 1943, les zones industrielles de la vallée de la Ruhr dans l’ouest de l’Allemagne ont été ciblées.

Dès juillet 1943, c’est au tour de Hambourg de connaître ce nouveau type de bombardement aérien.
La ville avait été choisie, en partie, parce qu’elle était jugée particulièrement vulnérable aux incendiaires.

Le premier raid nocturne, les 24 et 25 juillet, a impliqué environ 790 bombardiers de la RAF et a vu la première utilisation de Window, le nom de code de l’ivraie,
qui s’est avéré très efficace, seulement 12 bombardiers étant perdus.
Les dizaines de milliers de bandes de papier aluminium ont réussi à confondre les radars allemands et à entraver les tentatives d’interception
ou d’abattre la force de bombardement.
Remarquablement, au moins certains des équipages ne savaient rien de Window, ou comment l’utiliser, jusqu’à la nuit de cette mission.

La précision du raid a été améliorée par le nouveau système radar à balayage au sol H2S, qui a fourni au bombardier des indices de navigation basés sur des points de repère
à contraste élevé ci-dessous. Cela serait particulièrement efficace dans le cas de l’Elbe à Hambourg et des quais tentaculaires.


Une unité d’écran radar H2S utilisée pendant la Seconde Guerre mondiale.




Cependant, les 24 et 25 juillet, les bombes ne sont pas tombées avec la densité de concentration souhaitée, ce qui a réduit leur efficacité.
Environ 1 500 personnes ont été tuées lors de ce premier raid.

Le 25 juillet, environ 120 bombardiers de l’USAAF ont attaqué Hambourg pendant la journée, tandis qu’environ 50 bombardiers de l’USAAF ont frappé à nouveau le jour du 26.
À ces occasions, la cible était le port, plutôt que les zones résidentielles et les chasseurs allemands ont gravement malmené la force de bombardiers.


Une vue aérienne de Hambourg vue d’une formation de bombardiers B-17 Flying Fortress de l’USAAF lors d’un raid de jour.




C’est le raid nocturne des 27 et 28 juillet, impliquant cette fois environ 780 bombardiers de la RAF, qui a conduit à la première tempête de feu à Hambourg,
dans la partie orientale de la ville, dominée par des logements ouvriers à plusieurs étages.
La météo a également conspiré contre la ville portuaire allemande. L’été avait été long et étouffant, laissant partout très sec, et le 27 juillet avait été particulièrement chaud.
Dans le même temps, les équipes de pompiers étaient déjà engagées dans la lutte contre les incendies qui se poursuivaient dans d’autres parties de la ville,
après les raids précédents.

Avec Window s’assurant à nouveau que la plupart des bombardiers passaient, ces avions ont commencé à arriver au-dessus de la ville peu avant 1 heure du matin.
Cette fois, la quasi-totalité des 2326 tonnes de bombes sont tombées à proximité, exactement comme prévu.


Un Lancaster de la RAF lâche des paquets de Window au-dessus de la cible lors d’un raid de jour sur Duisburg, en Allemagne, en octobre 1944.
Droite : Le même Lancaster largue la majeure partie de son chargement, comprenant une bombe hautement explosive de 4 000 livres et 108 bombes incendiaires de 30 livres.

Très rapidement, les conflagrations ont commencé à se connecter et, alors qu’une colonne de feu déchirait 1 500 pieds dans le ciel,
plus d’air a été aspiré du niveau de la rue, créant l’enfer connu sous le nom de tempête de feu - Feuersturm en allemand.
Alors que des vents atteignant des vitesses de 150 miles par heure ont déchiré les parties de la ville touchées, les températures ont atteint 800 degres ou plus.
La chaleur était si intense que le verre a explosé, le métal s’est tordu et la maçonnerie a brillé d’un rouge terne.

Les équipes de pompiers déjà débordées ne pouvaient pas faire grand-chose à ce sujet.

Parfois, la scène infernale frisait le surréel, basée sur les récits de témoins.
L’un d’eux a décrit le son de l’incendie comme « un vieil orgue d’église quand quelqu’un joue toutes les notes à la fois ».
Privées d’oxygène, les bougies ont commencé à s’éteindre. Les chevaux couraient dans les rues, les animaux aussi en feu.
Les gens à l’air libre ont été piégés sur des routes alors qu’ils tentaient de s’échapper.
Pendant ce temps, tout ce qui n’était pas sécurisé était traîné vers le centre de l’incendie, y compris les gens.

Une résidente, Henni Klank, se souvient s’être échappée dans un abri souterrain, avec son mari et son bébé, une fois que les rideaux de leur appartement ont pris feu
et que le plafond a commencé à se fissurer.
« À ce moment-là, quelque chose s’est cassé chez un voisin et, pris de panique, il a pris sa couverture de lit et a voulu sortir », se souvient Klank.
« Aucun d’entre nous ne pouvait l’arrêter. Nous l’avons vu encore, mais seulement comme une torche vivante portée par la tempête de feu, volant dans les airs.


Photo aérienne verticale annotée prise lors du raid nocturne sur Hambourg les 24 et 25 juillet 1943.
Des bâtons d’incendiaires sont vus brûlant dans les quartiers d’Altona et des docks en haut, tandis que l’objet circulaire brillant
en bas à gauche est une bombe photo-flash.





Un récit similaire a été fourni par Paul Peters, un autre résident de Hambourg:
« La tempête de feu était si forte que les chapeaux ont été arrachés des têtes et tourbillonnaient dans l’air comme des boules de feu brûlantes », a-t-il écrit plus tard.
Même les petits enfants, courant seuls, ont été ramassés du sol et projetés dans les airs.

Cependant, les abris offraient peu de refuge en raison de l’intensité des incendies ci-dessus.
De nombreux résidents ont suffoqué, car l’air était aspiré hors des abris ou était cuit vivant.
Une zone mesurant environ 4 miles carrés a été presque entièrement détruite par la tempête de feu, bien que les dommages causés par ce raid s’étendaient
sur environ 12 miles carrés.
Au pire, le raid a laissé 16 000 immeubles d’habitation, abritant près de 450 000 personnes, en feu.


Vue aérienne oblique de bâtiments résidentiels et commerciaux en ruine dans le quartier d’Eilbek, au nord-est de Hambourg,
après le raid du Bomber Command dans la nuit du 27 au 28 juillet 1943.




Même les équipages des bombardiers au-dessus n’étaient pas entièrement isolés de ce qui se passait dans la ville.
Certains ont rapporté qu’ils pouvaient sentir la chaleur, et même l’odeur de la chair rôtie, alors que leurs avions devenaient couverts de suie.
« L’incendie était inimaginable », se souvient le lieutenant d’aviation Trevor Timperley.
Il a servi dans un escadron Lancaster Pathfinder équipé de H2S, chargé de trouver et de marquer la cible pour les bombardiers qui ont suivi.
« Je me souviens avoir dit au navigateur, qui était toujours absorbé par ses cartes : « Pour l’amour du Christ, Smithy, viens jeter un coup d’œil à cela.
Tu ne reverras plus jamais pareil ! »
« Mais Hambourg a soulevé pour moi pour la première fois l’éthique des bombardements », a ajouté Timperley.

Pour d’autres, la priorité était simplement d’accomplir les missions qui leur avaient été assignées – et de survivre.
Le mitrailleur de l’air Douglas Fry, mitrailleur de milieu supérieur sur un Stirling, se souvient du raid comme :
« Brillant, meilleur que [les raids précédents]. Les incendies étaient incroyablement violents; Vous ne pouviez pas voir une tache noire parmi cette énorme feuille de flamme
qui couvrait des acres et des acres.
Fry a ajouté: « Nous n’étions pas au courant de la tempête de feu - nous savions juste que la cible était bien allumée, ce qui signifiait un bon raid. »

Les autorités locales ont ordonné l’évacuation de Hambourg le 28 juillet, avant que la ville ne soit visitée par une autre tempête de feu dans la nuit du 29 au 30 juillet,
résultat d’un raid d’environ 770 bombardiers de la RAF.
Le dernier des raids de cette série a eu lieu les 2 et 3 août.
Cela a eu moins de succès, avec environ 740 bombardiers de la RAF dispersés après avoir rencontré du mauvais temps.

À la fin de l’opération Gomorrhe, entre 34 000 et 43 000 personnes avaient été tuées lors des six raids.
Avec environ la moitié de toutes les maisons de la ville détruites, environ 1 million de la population de 1,7 million ont été forcés de fuir.






En fin de compte, les raids sur Hambourg ne se répéteraient pas en termes d’échelle ou d’efficacité brutale.
Au fur et à mesure que la RAF se tournait vers des cibles plus éloignées, les raids redevinrent plus coûteux, tandis que les Allemands prenaient également des mesures
pour améliorer leurs défenses antiaériennes.
Bien sûr, le détournement d’avions de chasse et d’artillerie antiaérienne vers les villes allemandes signifiait moins d’armes ailleurs, y compris sur les lignes de front,
bien que l’efficacité globale de la campagne de bombardement de zone contre les villes allemandes reste un sujet de débat.

Mais pour le maréchal de l’air Arthur Harris, chef du Bomber Command, le but de la campagne était très clair, comme il l’a exprimé en octobre 1943 :

« Le but de l’offensive combinée des bombardiers... devrait être énoncé sans ambiguïté [comme] la destruction des villes allemandes, le meurtre des travailleurs allemands
et la perturbation de la vie civilisée dans toute l’Allemagne ...
La destruction de maisons, de services publics, de transports et de vies, la création d’un problème de réfugiés d’une ampleur sans précédent
et la dégradation du moral tant au pays que sur les fronts de bataille par crainte de bombardements prolongés et intensifiés sont des objectifs acceptés
et prévus de notre politique de bombardement. Ce ne sont pas des sous-produits de tentatives de frapper des usines. »

Alors que le Bomber Command a poursuivi des raids de ce type jusqu’à la fin de la guerre, y compris contre Dresde, il devenait de plus en plus clair que
des attaques plus précises contre des cibles spécifiques étaient possibles et, si elles avaient été priorisées, auraient presque certainement été plus efficaces
et moins coûteuses en termes de pertes d’équipages.

La raison pour laquelle l’héritage de l’opération Gomorrhe s’accorde mal avec les souvenirs du Bomber Command de la RAF et de ses missions de la Seconde Guerre mondiale
est claire. Il s’agissait d’une opération carrément destinée à tuer autant de personnes - civils - que possible, de la manière la plus efficace.
Des tactiques de bombardement incendiaire très similaires seront plus tard utilisées par l’USAAF au-dessus du Japon,
avec des pertes de vies civiles encore plus importantes.

Le roi Charles de Grande-Bretagne a récemment visité le Battle of Britain Memorial Flight à RAF Coningsby, dans le Lincolnshire, dans l’est de l’Angleterre,
pour rendre hommage aux vétérans du Bomber Command, qui ont mené l’offensive aérienne au cœur de l’Allemagne nazie pendant la Seconde Guerre mondiale.
Le point central de sa visite était le 80e anniversaire du légendaire raid des Dambusters en mai 1943.
Ce raid audacieux – et très coûteux –, qui a un statut presque emblématique au Royaume-Uni, est la façon dont le pays aime se souvenir de la contribution
du Bomber Command à la victoire sur l’Allemagne hitlérienne.
Les cibles des Dambusters étaient des barrages dans la région industrialisée de la Ruhr, leur but étant de diminuer la capacité de l’Allemagne à produire des armes.

On se souvient moins d’un autre raid, ou d’une série de raids, qui a eu lieu deux mois plus tard, en juillet 1943, il y a 80 ans cette semaine.
C’était l’opération Gomorrhe, et elle a apporté des destructions à une échelle terrifiante à la ville portuaire de Hambourg, dans le nord de l’Allemagne.

Dans ses commentaires à RAF Coningsby hier, le roi Charles a abordé la nature problématique de la campagne de bombardement alliée dirigée spécifiquement
contre les villes allemandes :
« Nous sommes critiqués par des gens qui n’auraient pas vu le jour si nous avions perdu la guerre », a-t-il déclaré, avec précision.
« Remerciez Dieu pour tous ces hommes ; Des gens comme vous s’occupaient de nous ».

Le roi Charles III et des veterans lors de la visite à la RAF Coningsby  pour commémorer le 80e anniversaire du raid des Dambusters.
Derriere un Avro Lancaster en parfait etat de vol




Il a poursuivi: « Et c’est la chose la plus importante, l’objectif du Bomber Command était de détruire la capacité allemande de nous attaquer, cela, et rien de plus.
Nous n’étions pas intéressés à tuer des civils, nous étions seulement intéressés à détruire leurs villes qui produisaient des armes et d’autres armes à utiliser contre nous.
Et dans l’ensemble, je pense que le Bomber Command a fait du très bon travail. »

Bien qu’il ne fasse aucun doute que le Bomber Command a apporté une contribution très significative à la victoire de la Seconde Guerre mondiale,
cela s’est fait au prix non seulement de plus de 50 000 membres de son propre équipage, mais aussi de 600 000 civils allemands tués dans des bombardements.
De toute évidence, les planificateurs de guerre étaient intéressés à tuer des civils. Quant aux parties de Hambourg spécifiquement visées en juillet 1943,
elles n’ont pas été choisies pour « produire des armements et d’autres armes », mais parce qu’elles abritaient des travailleurs civils et leurs familles.

Les implications morales de cette décision et d’autres similaires, et la question de savoir comment cette campagne de bombardement a affecté le cours de la guerre,
ne doivent pas être ignorées.


source
thedive.com

L'enfer sur terre.
Les travailleurs tués par les bombardements étaient souvent des déportés, et le moral des Allemands, pas plus d'ailleurs que celui des Britishs lors du "Blitz" de 1940, n'a pas faibli...

Quand ils bombardaient ils bombardaient pas à moitié, tuer était le maitre mot ! Tout tuer, "villes", civiles, animaux, militaires, tout même des maisons. De la boucherie tout de même.

Des corps gisent dans la rue après un raid aérien sur Hambourg, probablement en juillet 1943.




Un quartier résidentiel ouvrier de Hambourg, encore en ruines lorsqu’il a été photographié en 1947.




Aujourd hui

Sur Hambourg ce fut terrible. La ville fut quasiment rasé. Le port et l'activité liée en était aussi la cause.

Citation :

Des corps gisent dans la rue

Ces pauvres gens n'ont apparemment pas subi de "tempête de feu"...

vania a écrit:

Citation :

Des corps gisent dans la rue

Ces pauvres gens n'ont apparemment pas subi de "tempête de feu"...

Ca veut pas dire qu'il n'ont pas souffert, parfois la mort met des heures et des jours à venir.