Au cours de la Seconde Guerre mondiale, l'Armée de l'Air allemande (Luftwaffe) a formé des unités d’infanterie aéroportée d’élite (Fallschirmjäger). Contrairement au Royaume-Uni, au Commonwealth britannique et aux États-Unis, les parachutistes allemands faisaient partie de la Luftwaffe (Armée de l'Air) plutôt que de la Heer (Armée de Terre) car la Luftwaffe avait présenté un projet élitiste plus ambitieux. À partir d'un petit nombre de bataillons de Fallschirmjäger au début de la guerre, la Luftwaffe a mis en place une division constituée de trois régiments de Fallschirmjäger avec armes de soutien et moyens aériens, connu sous le nom de Flieger-Division (7ème Division Aérienne).
Le 9 avril 1940, lors de l’attaque du Danemark, les unités de Fallschirmjäger ont effectué la première opération aéroportée de l’histoire. Dans les premières heures du matin de l’opération Weserübung, ils ont attaqué et pris le contrôle de la base aérienne d'Aalborg qui a joué un rôle clé pour sa qualité de station de ravitaillement pour la Luftwaffe lors de l'invasion subséquente de la Norvège. Dans le même assaut, les ponts autour d’Aalborg ont été pris. D'autres attaques aériennes au cours de la bataille du Danemark ont également été menées, dont une sur un fort de l'île de Masnedø.
La première confrontation s'est produite au cours de la Campagne de Norvège, lors de l'invasion initiale, lorsque les Fallschirmjäger ont capturé la base aérienne de Sola, près de Stavanger. Les Fallschirmjäger ont aussi connu leur première défaite, largués sur le village en jonction du chemin de fer de Dombås le 14 avril 1940, il durent combattre seuls et en terrain inconnu les Forces armées norvégiennes quatre fois plus nombreuses dans ce secteur pendant une bataille qui dura cinq jours. Plus tard, les Fallschirmjäger de la 7ème division aérienne ont été réorganisés et utilisés comme base de nouvelles divisions parachutistes d’infanterie d’élite de la Luftwaffe, numérotées dans une série en commençant par Première Division Fallschirmjäger. Ces formations ont été organisées et équipées comme divisions d’infanterie motorisée, et ont souvent joué le rôle d’une brigade de « pompiers du Reich » (une manière imagée de dire : ceux qui interviennent pour faire taire le feu ennemi, là où ça chauffe très fort) sur le front occidental. Ils sont souvent rencontrés sur le champ de bataille comme groupes de combat (Kampfgruppen) détachés d'une division ou organisés en nombre d'actifs disponibles. Conformément à la pratique allemande devenue standard, les brigades parachutistes ont été appelées par le nom de leur commandant, comme par exemple : Groupe Erdmann en France et la Fallschirmjäger-Brigade Ramcke en Afrique du Nord.
Pendant la seconde moitié de la Seconde Guerre mondiale, les Fallschirmjäger n’étaient plus véritablement engagés dans des opérations aéroportées car ils étaient d'avantage utilisés dans le seul rôle d’infanterie d’élite en raison de la réalité de la situation stratégique, ils conservaient cependant à titre honorifique leur spécificité de troupes aéroportées. Vers la fin de la guerre, les divisions de Fallschirmjäger étaient environ plus d'une douzaine, comprenant un nombre important de nouvelles recrues entraînant une diminution de la qualité des unités. À compter de février 1945, ils reçurent des uniformes camouflés de type Leibermuster. Parmi ces divisions, la 9eme Division Fallschirmjäger, qui était la dernière division de parachutistes à être levée en Allemagne au cours de la Seconde Guerre mondiale. La division a été détruite aux dernières heures de la guerre au cours de la bataille de Berlin en avril 1945.
Récapitulatif des opérations.
Les Fallschirmjäger ont participé à de nombreuses batailles célèbres de la Seconde Guerre mondiale et sont intervenus dans de nombreux théâtres d’opération. En leur qualité de troupe d'élite, ils ont souvent été déployés dans des attaques de première ligne pour provoquer une brèche décisive dans la ligne adverse (par exemple lors de l’attaque du fort d’Ében-Émael en Belgique), mais ont également été utilisés en défense pour devenir un véritable rempart, stoppant net l’adversaire (par exemple : la bataille de Monte Cassino en Italie). Ils ont vu l'action sur tous les fronts, durant les campagnes de Norvège et au Danemark, en Belgique, aux Pays-Bas et en France en 1940, mais aussi les principales opérations de la Campagne des Balkans, Crète, Afrique du Nord, Italie, ainsi que sur le Front de l'Est et plus tard, le Front de l'Ouest. Les Fallschirmjäger ont été très respectés par les alliés, non seulement pour leur haute qualité combative mais aussi pour leur noblesse au combat, comme en attestent de nombreux témoignages vantant leur moralité.
En 1940, le Fort d'Ében-Émael verrouille la Meuse en Belgique, ce fort était réputé imprenable. Les espions allemands avaient clairement indiqué qu'il n'était pas possible d'attaquer Eben-Emael par des moyens conventionnels. Le fort, construit sur la Montagne Saint-Pierre était inaccessible par des escarpements infranchissables et à l’est tout franchissement était également stoppé par la tranchée de Caster, il était en plus de cela ceinturé de fossés aménagés pour bloquer les attaques de blindés. L'artillerie lourde du fort alignait des batteries de canons allant de 75 mm jusqu'à 120 mm pivotant sur des tourelles blindées possédant de multiples canons dont certaines pesaient jusqu'à 450 tonnes. Le fort comportait de multiples nids de mitrailleuses lourdes et de nombreuses batteries antiaériennes disposées tout autour, seul le toit du fort n'était pas défendu et c'est précisément par là que les allemands attaqueront. Le 10 mai 1940, avec leur planeur DFS 230, les 85 Fallschirmjäger de la 7e Flieger (7ème Division Aérienne) menés par le lieutenant Rudolf Witzig atterrissent sur le toit en faisant une spirale abrupte pour éviter la défense antiaérienne disposée tout autour du fort.
Planeur DFS 230
Petite anecdote : le toit du fort n'a pas eu de dispositif anti aérien car, les soldats faisaient leur tournoi de football dessus.
Une fois en place, les Fallschirmjäger s'emparent des positions ennemies en très peu de temps, ils détruisent les nids de mitrailleuses lourdes et anéantissent les énormes tourelles d'artillerie avec des charges creuses, de redoutables armes nouvelles pesant jusqu'à 50 kg qui devaient être posées et amorcées directement sur les tourelles et dont la sensibilité d'utilisation avait exclu leur transport en parachute. Les Fallschirmjäger ayant détruit les défenses du fort, le 151ème régiment d’infanterie allemand peut arriver en renfort. Les Allemands commencent alors à tenter de se frayer un chemin à l'intérieur du fort doté d'un important réseau souterrain de plus de trois kilomètres sur une hauteur de 40 mètres. Les Fallschirmjäger sont les premiers à y parvenir et après plusieurs heures de combat, le fort abandonne finalement toute résistance. La réussite totale, habile et rapide de la capture du Fort d'Ében-Émael considéré jusqu'alors comme imprenable, fut un coup terrible au moral des Alliés. Adolf Hitler, exalté par l'idée des retombées politiques que pouvait susciter un tel exploit à l'étranger, a tenté de convaincre en vain le dictateur espagnol Franco d'attaquer la forteresse britannique de Gibraltar en lui proposant l’aide des victorieux Fallschirmjäger d’Eben-Emael.
Nid de mitrailleuse du fort d'Eben Emael.
L'opération Merkur. En 1941, la Crète était solidement tenue par l’armée britannique et grecque mais le nombre des forces alliées en présence avait été totalement sous-évalué par les services de renseignements allemands. Le général Kurt Student attribuera d'ailleurs à la très mauvaise qualité des informations stratégiques données par les services de renseignements, la faute du mauvais déroulement de l’opération initialement prévue. Lors de l'attaque allemande, la Crète devient le théâtre d’un assaut aéroporté de grande envergure comprenant l'ensemble de la 7ème Division aérienne des Fallschirmjäger qui, quelques jours après d'âpres combats, sont rejoints par les renforts de la 5ème Division des Gebirgsjäger (troupes de montagne) qui sont transportés en Crète avec le ravitaillement sur l'aérodrome de Maleme capturé et sécurisé par les Fallschirmjäger.
Avant le décollage pour la Crête.
Atterrissage.
La bataille.
La Crète sera finalement conquise avec un grand nombre d’armes, de matériels et de soldats ennemis, mais les pertes subies lors de l'opération aéroportée par les Fallschirmjäger et leurs appareils de transport Junkers Ju 52 ont convaincu Hitler que les largages de parachutistes en masse avaient été une grave erreur. En réalité, Hitler ignorait que les Britanniques étaient déjà informés des moindres détails de l'opération allemande grâce au décodage de la machine Enigma (prise quelque temps plus tôt à bord du U-Boot U 110 par la Home Fleet), qui avait permis aux Alliés de connaître point par point les plans allemands. Dès le début de l'opération, tous les avantages étaient du côté allié : supériorité numérique, mauvais services de renseignements allemands, vents défavorables aux parachutistes et surtout les informations du plan de bataille décodées par Ultra. Malgré cela, les Fallschirmjäger ont vaincu un adversaire qui, déjà prévenu, les attendait en embuscade et qui de surcroit était supérieur en nombre (près de 5 fois plus nombreux qu’eux au premier jour de l'assaut). Dans ce contexte extrêmement défavorable, la victoire allemande est due en grande partie à la très grande combativité et au tempérament de fer des soldats d'élite que sont les Fallschirmjäger. Cependant Hitler ne voulut plus jamais engager ses précieux Fallschirmjäger dans le cadre d’opérations aéroportées de grande envergure, sonnant ainsi la fin des Fallschirmjäger dans leur rôle de parachutistes pour les utiliser désormais presque exclusivement en tant que troupes de choc (à ce titre, Kurt Student baptisera la Crète : le tombeau des parachutistes).
Utilisés dans le seul rôle d’infanterie d’élite, les Fallschirmjäger se sont illustrés en jouant un rôle clé dans la défense de position en France contre le gigantesque déferlement des forces alliées lors la bataille de Normandie suite au débarquement de 1944. Durant la bataille de Carentan, contre un adversaire toujours de plus en plus nombreux, les Fallschirmjäger y combattirent les parachutistes de la 101ème Airborne avec un tel acharnement que même lorsqu'ils durent évacuer la ville à cours de munitions le 11 juin 1944, ils attaquèrent les Américains au corps à corps, leur subtilisant leurs armes et munitions pour les retourner contre ces derniers. Les qualités combatives et de ténacité hors-norme des Fallschirmjäger ont tellement impressionné l’État-major durant cette bataille que le général Von Choltitz donne aux Fallschirmjäger du FJR6 (Fallschirmjäger Regiment 6) commandé par le lieutenant-colonel Von der Heydte le surnom de : Lions de Carentan. Hermann Göring en personne fut tellement fier de ces Fallschirmjäger, qu'il ira même jusqu'à proposer de donner le propre nom du Führer (Adolf Hitler) au régiment, bien que cela n'était pas dans la tradition de la Luftwaffe.
La bataille du mont Cassin a été l'un des plus marquants éclats de courage, de ténacité et d'habileté que les Fallschirmjäger ont démontré pendant la Seconde Guerre mondiale. La Première Division Fallschirmjäger tenait le terrain au centre de la ligne Gustave près de l'Abbaye de Monte Cassino sans occuper le bâtiment lui-même. L'importance historique du monastère bénédictin a incité le commandant en chef d’Italie, le feld-maréchal Albert Kesselring, de donner l'ordre aux unités allemandes en place de ne pas inclure l'Abbaye comme position défensive et a informé les Alliés en conséquence. Le haut commandement allié a refusé de croire que les forces allemandes n’utiliseraient pas une telle position de valeur dans leurs dispositif de défense. Ainsi, les ordres ont dûment été donnés pour que le monument historique (datant de l'année 1500) ne soit pas épargné par le terrible bombardement de Monte Cassino, fait par deux vagues successives de forteresses volantes, ne laissant plus qu'un champs de ruines. Après avoir été bombardés, les Fallschirmjäger ont su intelligemment tirer avantage de cette grossière erreur des Alliées. Ils se placèrent en position entre les pierres, barricadés derrière des restes de murs et dans les caves encore intactes, fournissant d’excellentes protections contre les bombardements. En plus de leur détermination au combat, cela a permis aux Fallschirmjäger de tenir pendant des mois contre les assauts répétés d’infanterie et les intenses bombardements d’aviation. Là, ils ont gagné leur surnom de « diables verts », faisant référence à leurs vestes de camouflage de modèle à éclat de longueur 3/4 et à la défense acharnée de la ville en ruines et du monastère de la montagne susnommée contre les Alliés pourtant infiniment plus nombreux. Les Fallschirmjäger ont infligé des pertes énormes aux forces alliées, une véritable boucherie (le Mont Cassin fut imagé comme un monstre dévoreur de soldats alliés). Après avoir bloqué ainsi pendant plusieurs mois l'avancée des Alliés en Italie, les Fallschirmjäger se sont finalement retirés de leurs positions uniquement dans le but d'éviter d'être encerclés. Après leur retrait, les Polonais d’abord puis les Gurkha, les Sénégalais, les Marocains et encore les forces brésiliennes sont finalement allés occuper les ruines du monastère.
Toujours en Italie, au cours de la bataille d'Ortona, une bataille féroce, moins longue que celle du Mont Cassin mais tout aussi importante à concerné le 3ème Bataillon du 3ème Régiment de la 1ère Division Fallschirmjäger. La 1ère Division d'infanterie canadienne et la 1ère Brigade blindée canadienne va y faire la connaissance des « Diables verts » . Du 20 au 28 décembre 1943, le caractère meurtrier de la bataille durant les combats rapprochés contre les Fallschirmjäger a tellement impressionné les Alliés qu’ils donnèrent le surnom à cette bataille de « petite Stalingrad »15.
À Gran Sasso, 382 Fallschirmjäger du 1er bataillon du 7ème régiment des Fallschirmjäger dirigés par le major Harald Mors sont engagés dans l'opération Eiche. Cette opération spéciale, placée sous la responsabilité et le contrôle opérationnel du général des Fallschirmjäger Kurt Student, a pour objectif principal la libération de Benito Mussolini mais aussi de permettre au SS Haupsturmführer Otto Skorzeny et son insignifiant petit commando de 26 SS d'être sur les lieux pour faire de la figuration pour la propagande nazie qui l'encensera à tort. Mussolini est retenu prisonnier par plusieurs soldats italiens ayant reçu l'ordre de l'exécuter en cas de tentative d'évasion dans l'hôtel Campo Imperatore, situé à 2 130 mètres d'altitude où on ne peut accéder que par téléphérique, considéré comme inaccessible par d'autres moyens. Lors du déroulement de l'opération, les Fallschirmjäger arrivent par planeur DFS 230 et s'emparent très vite de l'hôtel Campo Imperatore où est retenu prisonnier Mussolini, permettant à Skorzeny d'aller à la rencontre du Duce. Ils capturent rapidement la station de téléphérique d'où arrivent les renforts ennemis et détruisent à toute vitesse tous les barrages routiers sur leur chemin puis construisent une piste d'atterrissage pour l'avion qui récupère Mussolini avant de s'envoler vers l'Allemagne. Les Fallschirmjäger du Lehr-Bataillon Mors ont rempli avec un éclatant succès tous les objectifs de cette opération en capturant très rapidement toutes les positions clés, c'est aussi l'une des dernières opérations aéroportées allemandes.
Les dix commandements.
1)Vous êtes les soldats d'élite de l'armée allemande. Vous rechercherez le combat et vous vous entraînerez aux plus dures épreuves. La bataille sera pour vous le but suprême.
2)Cultivez la vraie camaraderie, car c'est avec l'aide de vos compagnons que vous irez à la victoire ou à la mort.
3)Soyez avares de paroles. Incorruptibles. L'homme agit et laisse aux femmes leur paquetage. Ce dernier pourrait vous conduire au tombeau.
4)Soyez calmes et prudents, forts et résolus. La bravoure, l'enthousiasme, l'esprit d'offensive vous donneront dans l'attaque l'ascendant sur votre adversaire.
5)En présence de l'ennemi, rien de plus précieux que les munitions. Celui qui tire sans nécessité, seulement pour se donner du courage, est un pleutre qui ne mérite pas le titre de
parachutiste.
6)Ne vous rendez jamais. Pour vous, la victoire ou la mort. Il n'est point d'autre alternative. C'est une question d'honneur.
7)Point de triomphe sans bonnes armes. Soumettez-vous à cette loi : d'abord mes armes, moi-même ensuite..
8)De chacune de vos entreprises, vous devez en saisir pleinement la portée afin d'être à même, si votre chef est tué, de la mener à bien à sa place.
9)Contre un ennemi qui combat à visage découvert, battez-vous avec chevalerie. Mais à la guérilla, ne faites point de quartier.
10)Tenez vos yeux grands ouverts. Élevez-vous à la hauteur des héros. Soyez aussi rapides que le lévrier, aussi résistants que le cuir, aussi durs que l'acier de Krupp et vous serez l'incarnation parfaite du guerrier allemand.