Leyte: Bataille de Samar (25 octobre 1944 )
Situation le 25 octobre 1944 au lever du soleil. Cette journée marque l'apogée de la bataille de Leyte, avec deux batailles navales majeures livrées en même temps et l'entrée en scène d'une nouvelle arme, inaugurant une nouvelle phase dans la guerre du Pacifique.
La bataille du Cap Engano est très unilatérale. Les porte-avions du Japonais Ozawa sont quasiment dépourvus d'avions alors qu'Halsey en a près d'un millier à sa disposition. Le résultat n'avait jamais été douteux et le Japonais perd tous ses porte-avions, soit au cours du combat aéronoval, soit achevés par des croiseurs américains envoyés pour les achever pendant la nuit. Exit de l'appât, après qu'il ait rempli sa mission.
La bataille de Samar fut également unilatérale, mais elle tourna à la confusion du Goliath japonais. Malgré son énorme supériorité en canons, Kurita n'exploite pas à fond son avantage et ne pousse pas jusqu'aux plages de débarquement. Le groupe de petits porte-avions américains le retarde et l'incite finalement à faire demi-tour après deux heures et demi de combat.
A posteriori, il est certain que Kurita ne serait jamais revenu du golfe de Leyte s'il avait poussé jusque là. Il aurait été pris entre l'enclume des cuirassés d'Oldendoff de retour de Surigao (mais manquant de munitions) et le marteau des porte-avions d'Halsey de retour du Cap Engano. Sur le moment, Kurita ignorait tout cela, il ne savait tout simplement pas où étaient passés les porte-avions lourds et les cuirassés américains. La crainte de les voir apparaître à tout instant a du peser le plus lourd dans sa décision de se retirer prématurément. Il repasse par le détroit de San Bernardino le soir et met le cap sur Brunei. Les cuirassés rapides qu'Halsey avait envoyé à sa poursuite n'auront qu'un destroyer à se mettre sous la dent.
Deux autres événements sont encore à signaler pendant cette journée du 25 octobre. D'abord, le départ du premier des convois TA vers Ormoc (baie à l'ouest de Leyte). Pendant plus d'un mois, ils apporteront aux défenseurs japonais de l'île les renforts et les approvisionnements qui leurs permettront de continuer à résister beaucoup plus longtemps que ne l'avaient prévu les alliés.
Le second est plus important et spectaculaire: c'est la première attaque des kamikazes, les avions suicides japonais. Ils prennent pour cible les petits porte-avions qui venaient de livrer la bataille de Samar, leurs infligeant de nouvelles pertes. Cette nouvelle forme de guerre surprend les Américains. Ils devront pourtant s'y habituer, car elle sera pratiquée par les Japonais jusqu'à la fin du conflit.
Le sacrifice des destroyers US de l unite "Taffy 3"
L USS JOHNSTON et l USS SAMUEL B. ROBERTS au combat
Ces petits destroyers et destroyers d'escorte commençaient à arriver en grand nombre dans l’arène du Pacifique vers la fin de l’année 1943, alors que les combats pour la reconquête des îles faisaient rage, et ils supportèrent le gros des batailles. Certaines pages glorieuses de l’Histoire furent écrites par ces petits destroyers, le plus souvent dans le sang. A eux seuls, ils avaient mis à mal les redoutables croiseurs japonais et réussirent même parfois à reprendre l’avantage. Les plus célèbres parmi ces destroyers furent sans aucun doute le DD-557 et DE-413… dont voici leur ultime combat à la Bataille de Samar…
USS JOHNSTON
USS SAMUEL B. ROBERTS
Les forces en présence :
US Navy
Porte-avions d’escorte : FANSHAW BAY, ST-LO, WHITE PLAINS, KALININ BAY, KITKUN BAY, GAMBIER BAY
Destroyers et escorteurs : HOEL, HEERMANN, JOHNSTON, DENNIS, SAMUEL B. ROBERTS, JOHN C. BUTLER, RAYMOND
Marine Impériale Japonaise
Cuirassés : YAMATO, NAGATO, KONGO, HARUNA
Croiseurs : CHOKAI, CHIKUMA, TONE, KUMANO, SUZUYA, HAGURO, NOSHIRO, YAHAGI
Destroyers : Onze unités
En ce 25 octobre 1944, les destroyers JOHNSTON et SAMUEL B. ROBERTS étaient donc affectés à la Task Force 77.4.3, nom de code « Taffy 3 », composée de seulement 6 porte-avions d’escorte et de 7 destroyers. Une flotte de guerre nippone, partie intégrante du plan "Sho-Go", venait d’être repérée un peu plus tôt, et la Task Force de porte-avions rapides de l’amiral Halsey s’était aussitôt lancée à sa poursuite. Mais il s’avéra que cette flotte japonaise n’était qu’un leurre, car leur force de combat principale – avec le cuirassé YAMATO à leur tête – s’approchait des Philippines à toute vapeur. Et à présent, il n’y avait plus qu’une mince « barrière » entre cette force japonaise et la force de débarquement américaine de Leyte : Taffy 3.
Une course-poursuite s’engagea, les destroyers américains tentèrent de couvrir la retraite des porte-avions d’escorte par un écran de fumée mais les Japonais gagnaient du terrain. Seuls 17 milles les séparaient encore des deux forces navales.
Et voici la suite chronologique du combat :
06h47 : Un des avions du groupe central (Taffy 2) émit le message de détresse suivant : "Suis pris sous le feu d'une force navale japonaise !"
06h53 : Un porte-avions de « Taffy 3 » reçut un message encore plus alarmant : "Force ennemie composée de cuirassés, croiseurs, destroyers à 20 milles dans le 340." Le mot « cuirassé » jeta l'effroi sur les formations américaines.
06h58 : L’amiral Sprague ordonna à son escadre de virer face au vent pour lancer les avions d’attaque, dans l'espoir de retarder la flotte japonaise.
07h01 : Le cuirassé YAMATO tira la première salve à 30.000 m de distance, suivi par les autres cuirassés. La surprise fut totale car l’amiral Kinkaid croyait à tort que la TF 34 de la 3ème Flotte patrouillait toujours devant San Bernardino. La première salve du YAMATO explosa au beau milieu de la formation, la seconde salve à 200 mètres du porte-avions WHITE PLAINS, la troisième l’encerclant littéralement. Le navire américain fut secoué par les explosions sous marines causées par les obus de 460 mm, qui engendrèrent d’ailleurs de gros dommages aux machineries.
Yamato
07h21 : Un grain providentiel surgit et masqua momentanément la formation à la vue de l'ennemi.