Deux mois après le début de la Première Guerre mondiale, le front occidental se fige et les troupes s'enterrent. Dans cette guerre de tranchées s'apparentant à une gigantesque guerre de siège, l'artillerie lourde prend subitement un rôle considérable. En France, après avoir déployé le long du front l'artillerie des places (la « barrière de Bange ») et l'artillerie côtière, on envisage d'utiliser à leur tour les énormes canons de marine pour former l'« artillerie lourde à grande puissance » (ALGP).
Le 22 juillet 1915, à la demande du GQG français, le ministère de la Guerre passe commande de huit pièces d'artillerie au calibre 400 mm : cette arme très puissante est destinée à frapper les points les mieux retranchés du front allemand. Il s'agit d'avoir une sorte d'équivalent français des obusiers de 420 mm allemands (grosse Bertha) qui avaient fait leurs preuves contre les forts belges de Liège et ceux français de Maubeuge et de Manonviller. Pour gagner du temps sur la période d'étude et de mise au point, fut décidé d'utiliser des gros canons déjà existant pris sur des navires désarmés.
Étant donné la masse considérable du tube, dépassant largement les capacités de transport des attelages hippomobiles et même des gros tracteurs d'artillerie, les concepteurs font le choix de l'affût-truck (c'est-à-dire un wagon spécial). Plutôt qu'utiliser le freinage le long de la voie ferrée pour supporter le recul (tel que sur un « affût à glissement ») et pour permettre un champ de tir jusqu'à 65° en vertical, la méthode de l'« affût en berceau » fut privilégiée, nécessitant la construction pour chaque position de tir d'une plateforme au-dessus d'une fosse. Le résultat est une arme coûteuse (d'autant que les matières premières manquent), dépendante du réseau ferroviaire, difficile à mettre en position (il faut deux jours pour construire la plateforme de tir, plus une heure pour mettre en batterie), avec une cadence de tir lente, d'une portée assez moyenne pour l'époque (vitesse initiale modeste et angle de tir élevé), mais avec une très bonne précision et surtout un énorme pouvoir de destruction des ouvrages fortifiés.
Pour répondre à cette commande, la Compagnie des forges et aciéries de la marine et d'Homécourt (plus connue par son principal site de production : Saint-Chamond) réutilise les canons de 340 mm modèle 1887 construit par la fonderie de Ruelle pour le cuirassé Brennus, ainsi que pour les garde-côtes Valmy et Jemmapes, trois unités désarmées car périmées. Six de ces tubes sont raccourcis et réalésés au calibre 400 mm pendant l'année 1915, puis trois autres au début de 1916. Sur ces neuf tubes, huit sont montés chacun sur un affût-truck, c'est-à-dire un wagon-poutre monté sur deux bogies, l'un avec six essieux à l'avant et l'autre avec quatre à l'arrière ; le neuvième tube sert de pièce d'essai sur le polygone de tir de Gâvres.
Une seconde commande est passée en janvier 1917 pour quatre autres exemplaires et trois tubes de rechange. Saint-Chamond utilise cette fois-ci des canons de 340 mm modèle 1912 qui devaient servir à armer les cuirassés de la classe Normandie, navires jamais terminés. Les deux modèles ont les mêmes caractéristiques et tirent les mêmes projectiles. En cas d'usure importante du tube, un réalésage était prévu au calibre 415 mm, mais ces pièces ne furent pas utilisées de façon intensive.
Les obusiers de 400 mm armèrent en 1916 quatre puis en 1918 six batteries, chacune armée avec deux pièces. Chacune de ces pièces se déplace sous forme d'un train de 11 wagons et 260 mètres de long, composé d'une locomotive, d'un affût-truck, d'un wagon aux armements, d'un wagon plateforme, d'un wagon à combustibles, de wagons à personnel et de wagons à munitions (à raison de 12 coups chacun).
Chaque batterie est commandée par un capitaine d'artillerie, avec un lieutenant pour adjoint et un effectif total de 125 hommes.