Si les débats prirent fin le 6 avril 1948, il fallut plusieurs mois aux juges pour rédiger leur jugement qu'ils rendirent public du 4 au 12 novembre 1948.
Yōsuke Matsuoka et Osami Nagano étant morts de causes naturelles (tuberculose, attaque cardiaque) pendant le procès, Okawa Shumei ayant été interné pour troubles mentaux
dès le début de la procédure, le verdict ne concerna que 25 accusés sur les 28.
Tous furent déclarés coupables (à Nuremberg, il y eut des acquittements). Des cinquante-cinq chefs d'accusation — soit par insuffisance de preuves soit par amalgame
de charges voisines — seuls dix furent évoqués dans le verdict (huit au titre de guerre d'agression, deux au titre d'atrocités).
Aussitôt, les défenseurs introduisent un recours auprès du général MacArthur (au titre de l'article 17 de la Charte) qui, après consultation du Conseil Interallié
pour l'Extrême-Orient le 22 novembre, confirme finalement — sans surprise — la décision du tribunal le 24 novembre.
Sept condamnés tentèrent encore de saisir la Cour suprême des États-Unis, qui se déclara finalement incompétente le 20 décembre.
L'exécution des sept condamnés à la peine de mort suivit aussitôt. Ils furent pendus le 23 décembre 1948 dans la prison de Sugamo. Il s'agissait de :
Kenji Doihara, ex général ;
Koki Hirota, ex premier ministre ;
Heitarō Kimura, ex général ;
Seishirō Itagaki, ex ministre de la guerre ;
Iwane Matsui, ex général ;
Akira Mutō, ex général ;
Hideki Tōjō, ex premier ministre.
Hideki Tōjō
Aucune photographie de l'exécution ne fut permise ; les corps des condamnés furent incinérés et leurs cendres dispersées par avion au-dessus de la baie de Tokyo
afin de prévenir toute commémoration ultérieure autour d'une tombe. Une source japonaise plus tardive prétend toutefois qu'une partie des cendres,
soustraite à cette dispersion, aurait été enterrée près de Nagoya en 1960.
Tous les autres prévenus furent condamnés à des peines d'emprisonnement de 7 ans (Mamoru Shigemitsu),
20 ans (Shinegori Togo), ou à perpétuité (Sadao Araki, Kingoro Hashimoto, Shunroku Hata, Kiichiro Hiranuma, Naoki Hoshino, Okinori Kaya, Kōichi Kido, Kuniaki Koiso,
Jiro Minami, Takazumi Oka, Hiroshi Oshima, Kenro Sato, Shigetaro Shimada, Toshio Shiratori, Teiichi Suzuki, Yoshiro Umezu). Kuniaki Koiso, Toshio Shiratori, Yoshijiro Umezu
et Shigenori Tōgō moururent en prison durant leur peine.
Le 24 décembre 1948, à la suite d'une décision du gouvernement américain mais contre l'avis de MacArthur, dix-neuf prévenus accusés de crime de guerre de classe A
furent libérés (six autres étaient morts en détention — comme le général Hayao Tada — ou avaient été libérés plus tôtN 2 :
les juristes pensaient qu'il y avait peu de chances qu'ils soient condamnés au titre de crime de guerre de classe A suivant la jurisprudence établie par le procès de Tokyo
(deux d'entre eux furent toutefois ultérieurement poursuivis de nouveau, cette fois pour crimes de guerre conventionnels).
Okawa Shumei, qui avait recouvré ses esprits depuis longtemps, fut également libéré de son asile une semaine après ces exécutions.
Certains des hommes politiques suspectés de crime de guerre qui ne furent pas jugés par le tribunal purent reprendre une vie politique, après la fin de l'interdiction
de participation aux affaires publiques, en 1952, comme Nobusuke Kishi qui fut premier ministre en 1957, ou Ryōichi Sasakawa.
Les suites du procès
En 1949, la ville de Khabarovsk sera le lieu des Procès de Khabarovsk, où furent jugés douze criminels de guerre japonais, anciens membres de l'Armée japonaise du Guandong
pour l'utilisation d'armes biologiques produites par l'Unité 731 dans la région de Changde pendant la Seconde Guerre mondiale.
Le premier février 1950, les soviétiques appellent les États-Unis et leurs alliés à instituer un tribunal d'exception pour juger l'empereur ainsi que quatre généraux japonais,
dont Ishii, au titre de crime contre l'humanité. Un refus leur est notifié par le biais d'un communiqué de presse en date du 3 février.
Le 7 mars 1950 le commandement américain publie la circulaire no 5 Clemency for War Criminals prévoyant la libération anticipée de prisonniers ayant fait preuve
de bonne conduite. Mamoru Shigemitsu profite de cette disposition : il est relâché sur parole le 21 novembre 1950.
Par le Traité de San Francisco — signé le 8 septembre 1951, qui prendra effet le 28 avril 1952 — le Japon s'est engagé à respecter le verdict du tribunal
(en comparaison, l'attitude du gouvernement de la République Fédérale Allemande sera beaucoup plus ambigu concernant le Procès de Nuremberg ;
à l'inverse, le gouvernement allemand conduira lui-même quelques procès après son indépendance, ce que ne fit pas le Japon).
Dans les années 1950 s'exprima un mouvement demandant l'aménagement des peines prononcées, voire l'amnistie des condamnés.
Plus de dix millions de personnes pétitionnèrent en faveur des criminels de guerre emprisonnés.
Le 16 juin 1952, le baron Kiichiro Hiranuma est libéré sur parole pour raisons de santé.
Le 4 septembre 1952, le Président Harry Truman émet l'ordre exécutif no 10393 instituant un comité chargé d'examiner les demandes d'atténuation des peines formulées
par le gouvernement japonais.
À compter de 1954, les condamnés furent libérés par le nouveau Parti libéral démocrate et le retour au pouvoir d'anciennes personnalités influentes du régime shôwa
comme Ichiro Hatoyama et Nobusuke Kishi.
En 1954, Hashimoto Kingorô, Hata Shunroku, Minami Jirô, et Oka Takazumi furent libérés sur parole. Araki Sadao, Hoshino Naoki, Kaya Okinori, Kōichi Kido, Ôshima Hiroshi,
Shimada Shigetarô, et Suzuki Teiichi le furent en 1955. Satô Kenryô, pourtant un des condamnés dont la condamnation était la plus discutée, ne fut libéré qu'en mars 1956.
Cette libération permit à certains criminels d'occuper à nouveau des postes très importants dans l'administration japonaise, comme Mamoru Shigemitsu
qui fut ministre des Affaires étrangères du gouvernement.
Shigemitsu Mamoru
Ces libérations anticipées (ainsi que les cas non traités, comme la responsabilité de Hirohito) furent le reflet de la politique ambiguë des États-Unis vis-à-vis du Japon.
La guerre froide battant son plein (avec la guerre de Corée), il fallait faire du Japon un pays allié et le meilleur moyen était de tourner la page le plus rapidement possible.
Cela favorisa certainement la montée d'un révisionnisme japonais sur les crimes de guerre commis par le Japon.
En 1978 les « âmes » de 14 personnes exécutées comme criminels de guerre de classe A furent « accueillies » dans le sanctuaire Yasukuni.