Faciles à conduire mais difficiles à stopper, les terrifiants camions bourrés d’explosifs conduits par les kamikazes du groupe djihadiste Etat islamique (EI) refaçonnent le champ de bataille en Irak et en Syrie.
Les djihadistes ont eu recours à une trentaine de ces « camions bombes » au cours de leur récente conquête de la ville irakienne de Ramadi. Ils les ont utilisés pour faire exploser des positions des forces gouvernementales et de leurs alliés qui avaient résisté à leurs assauts pendant plus d’un an.
Transports de troupes, pick-ups, camions-citernes et camions à benne: différents types de véhicules sont volés par les combattants qui les bourrent de tonnes d’explosifs et les protègent avec des armatures en acier.
Lorsqu’une position adverse est trop bien défendue pour une attaque conventionnelle, un kamikaze se met au volant de l’un de ces véhicules, perce les défenses ennemies puis fonce vers son objectif où il déclenche l’explosion.
Ces bombes ambulantes « sont protégées du feu des (mitrailleuses) 12,7 mm et même de certaines roquettes RPG. Il y a une telle quantité d’explosifs qu’elles restent efficaces à une distance de 50 mètres », affirme un expert militaire basé en Irak.
Les vidéos des attaques aux camions explosifs, auxquelles l’EI a également eu recours dans la bataille de la ville de Kobané en Syrie et sur d’autres fronts, montrent d’énormes explosions visibles à des kilomètres.
« Les dégâts sont plus importants que ceux provoqués par une bombe d’une demi-tonne larguée par un avion de combat », ajoute l’expert occidental. « Ces camions bombes sont l’équivalent de leur force aérienne ».
SANA/AFP« Attaque au « camion bombe » à Hama en Syrie »
L’EI n’a pas inventé ce qui est maintenant connu sous le nom de SVBIED, ou « engin explosif improvisé placé dans des véhicules suicide ».
Des charrettes bourrées d’explosifs ont déjà été utilisées il y a plus de deux siècles, à l’image de cette tentative d’assassinat avortée en 1800 contre Napoléon à Paris.
Le potentiel dévastateur de ce mode d’action a été ensuite démontré par l’attentat de Wall Street en 1920 mené par l’anarchiste italien Mario Buda, affirme Mike Davis, auteur de « Buda’s Wagon: A Short History of the Car Bomb ». Il avait fait 38 morts.
L’EI a utilisé ces véhicules piégés à Bagdad pour des motifs similaires: semer la terreur et illustrer l’incapacité des autorités à assurer la sécurité.
Si ce mode d’action avait déjà été utilisée durant l’invasion américaine de l’Irak, les commandants de l’EI sont aujourd’hui passés au niveau supérieur.
« C’est peut-être la première fois que les SVBIED sont utilisées comme partie intégrante d’une bataille au Moyen-Orient », souligne Andrew Terrill, professeur à l’US Army’s Strategic Studies Institute.
Les Tigres Tamouls au Sri Lanka avaient intégré les voitures et les camions suicide dans les assauts d’infanterie avant l’EI, mais M. Davis relève que ces attaques étaient menées en « solo » pour déclencher des combats.